En feuilletant les livres anciens de l'élevage, on trouve des indications curieuses.
La première fille de la vache Lineada, baptisée Judia, marquée du nº 31, née en 1948, de robe mulata, barriga blanca (on dirait bragada aujourd'hui), n'est pas morte de cause naturelle et n'a pas été non plus envoyé à l'abattoir échouant au test de sélection ...
Non, cette génisse est "muerta por lobo" le 21 décembre 1949. Traduction littérale, elle est morte "par loup". Elle s'est faite tuée par un loup.
La preuve est là, en 1949, des loups erraient encore sur les terres de Mirandilla et dévoraient les veaux et velles!
Trouvez ci-dessous, l'histoire "Les loups" extraite de mon ouvrage pour enfants "Luminoso se mit à parler ..." qui évoque vaches, veaux, loups et chiens au campo.
"Les
Loups.
Cette nuit de nouvelle lune a encore été fatale pour le
troupeau de vaches.
Une meute de loups affamés est descendue des montagnes.
Deux veaux à peine âgés d’une semaine se sont faits dévorer par les fauves. Mal
organisées, les mères n’ont pu empêcher ce terrible carnage. C’est déjà la
troisième fois que cela survient ce mois-ci.
La reine des vaches-mères réunit tout le troupeau.
- La situation est grave. Cela ne
peut plus continuer ainsi. Nous devons réagir. Si tous nos enfants sont mangés
par les loups, le troupeau sera décimé. Dans quelques années il n’y aura plus
de taureaux de combat pour la corrida. Notre race disparaîtra.
- Mais que pouvons-nous
faire ? s’inquiète une belle vache rousse. Les loups sont plus forts que
nous. Ils sont plus méchants.
- Nous devons utiliser notre
instinct maternel de protection. Nous sommes trop naïves. Les loups profitent
de notre mésentente pour nous surprendre. Trouvons ensemble une parade.
Toute la journée les vaches discutent des solutions à
apporter. Elle élaborent un plan qui s’avère sensationnel et fonctionnera les
nuits, les semaines, les mois et les années suivantes. En fait, ce plan
deviendra la survie de la race des taureaux de combat pour des siècles. Il est
encore en vigueur de nos jours.
D’abord consigne est donnée aux mamans de faire naître le
veau dans un endroit camouflé. Même s’il faut pour cela parcourir des
kilomètres et s’éloigner du troupeau. Le lieu de la naissance doit être
inaccessible pour l’ennemi.
Les loups qui ont un odorat très développé sont attirés
de très loin par les odeurs qui entourent le nouveau-né. Il est décidé que tous
les déchets qui apparaissent lors de la venue au monde seront mangés par les
mères pour faire disparaître les traces de la naissance.
Le veau devra rester caché dans cet endroit retiré au
moins une semaine. Lorsque la mère le sentira suffisamment fort, elle le
sortira de la cachette et ira le présenter au reste du troupeau.
S’organisera aussi un système de garderie. Une maman sera
en charge de la surveillance d’un groupe de huit ou dix veaux. Cette vigilance
se fera jour et nuit et à tour de rôle. Ainsi les autres mamans peuvent sans
crainte vaquer à leurs occupations. En cas de péril, la surveillante pourra
alerter les autres immédiatement.
Les mamans apprendront aussi à se battre contre les
loups. Elles se serviront de leurs cornes pour les attaquer et les blesser.
Elles doivent se faire respecter.
Enfin, chaque maman devra expliquer à son enfant le
danger réel que représente le loup afin qu’il se méfie et puisse être sur ses
gardes.
Des milliers d’années plus tard, la vache Revoltosa, ne
se fait pas prier. Lorsque le chien de la ferme, Pimpon, s’est approché en
reniflant de l’endroit où elle tenait caché son veau récemment né, son sang n’a
fait qu’un tour. Eloigné d’une centaine de mètres elle accourt au galop. Elle
fonce avec fureur, soufflant sa rage. Le chien comprend qu’il est en danger,
que la colère de la vache est réelle et applique la tactique la plus efficace
dans cette situation : la fuite éperdue en aboyant de peur.
L’organisation de défense mise en place par ses ancêtres
les vaches a encore fonctionné.
Pimpon ne comprend pas ce qui lui arrive. Il ne se doute
pas qu’il est la cible d’une haine qui date de plusieurs siècles. De
générations en générations la mémoire des vaches a transmis cette rancune.
L’hostilité que toutes les vaches du monde accumulent
depuis la nuit des temps envers le loup s’est retournée, par assimilation, vers
lui, de la race la plus proche, le chien."